Dr Joseph Pierre, suite de l’Article 1

Published on December 12, 2025 at 11:23 AM

Difficile de dire si elles excellent dans ce domaine, mais en tant qu’agronome spécialisé dans l’éducation et le développement agricoles et ruraux, je me demande si, finalement, les autorités haïtiennes qui gèrent ces institutions publiques et privées comprennent pleinement ce concept. Commençons par une définition simple de l’agriculture. On parle d’agriculture lorsqu’une personne, Jean par exemple, prend une plante (un plant de pomme de terre, par exemple) ou un animal (une vache, par exemple) et l’aide à prospérer afin de pouvoir bénéficier de sa production

Mais pour que Jean puisse aider un oranger à produire de belles oranges à manger et à vendre, pour qu’il puisse aider une vache à produire suffisamment de lait pour nourrir ses enfants et en vendre une partie, Jean doit savoir comment vit l’oranger ou la vache. Pour que Jean soit un agriculteur produisant bien pour la consommation, l'industrie et les marchés locaux et internationaux, il doit être capable d'appliquer à l'agriculture toutes les sciences, les technologies et les arts que nous enseignons à tous les niveaux dans nos écoles et universités.

Parmi ces nombreuses disciplines, citons les mathématiques, la physique, la chimie, les différentes branches de la biologie, les sciences de la Terre, l'économie et bien d'autres. Mes amis, dans ce court texte que je vous propose aujourd'hui pour réflexion, nous ne pouvons aborder la multitude de questions qui occupent de nombreuses pages dans de nombreux ouvrages. Mais je crois que nous pouvons comprendre que, quelles que soient les activités menées par les institutions que nous avons mentionnées ci-dessus, elles doivent savoir que, dans le cas d'Haïti en particulier, le développement agricole doit reposer sur quatre piliers ou leviers :

(1) l'enseignement à tous les niveaux dans nos écoles, ce que nous appelons « l'éducation formelle » ;

(2) la recherche scientifique continue, car nous devons continuer à comprendre et à apprendre tout ce qui existe dans le pays et qui est lié à la vie de toutes sortes de plantes et d'animaux ; et mettre ces connaissances à la disposition de toutes les écoles, qui enseignent toutes les matières liées à l'agriculture et à d'autres activités ;

(3) la diffusion et la vulgarisation des connaissances théoriques et pratiques en agriculture (comme dans d’autres domaines) auprès de tous ceux qui ne sont ni étudiants d’universités ni élèves d’écoles, mais qui travaillent et ont besoin de ces connaissances pour développer et améliorer leur production (éducation non formelle) ; la gestion des ressources naturelles en général, et des terres, des sols et de l’eau en particulier. Dans cette perspective, nous souhaitons dépasser l’expression « réforme agraire », qui s’apparente davantage à une révolution de politicaillerie bruyante qu’à la recherche de solutions concrètes pour la libération juridique et technique des terres agricoles. Nous devons abandonner ou banaliser l’agriculture paysanne traditionnelle ou de subsistance.

L’objectif est de parvenir à un système national de production agricole où prédominent la science moderne et les technologies de pointe, une agriculture haïtienne moderne qui produit pour la consommation, les industries locales et l’exportation, et qui crée de nombreux emplois.

Nous avons évoqué le développement rural dans l’introduction, mais nous n’avons ni le temps ni l’espace pour l’approfondir. Le développement rural englobe toutes les actions entreprises par les institutions et les citoyens dans les zones rurales ou les sections communales pour mettre en place les infrastructures nécessaires à leur développement, leur apprentissage, leur travail et leur bien-être. Chaque ministère public a un rôle à jouer dans le processus de développement rural. Les populations rurales ont besoin de bonnes écoles et d'accès à l'université ; elles ont besoin d'infrastructures routières de qualité ; d'hôpitaux efficaces ; de services de sécurité fiables ; de sites touristiques aménagés et d'activités de loisirs, etc.  Tous ces élémets, dans les zones rurales ou les sections communales, font partie intégrante du développement rural. Et ils sont tous étroitement liés à l'éducation formelle et informelle et à la recherche scientifique, comme mentionné précédemment. Si nos institutions n'ont pas cette vision, elles risquent de s'épuiser dans diverses tâches, mais elles ne contribueront pas au développement en tant que tel. Le développement socio-économique (rural, agricole, d’éducation, de santé, d’infrastructure et autre) est un ensemble d'actions menées pour et avec les populations.  

Et puisque nous travaillons avec des êtres humains, l'éducation formelle, la recherche scientifique et la diffusion des connaissances (enseignement informel) sont des activités permanentes pour tous ceux qui participent au développement d'une manière ou d'une autre. Je laisse ce texte à mes jeunes compatriotes, en espérant qu'ils suivront mes conseils dans un Haïti qui sera véritablement digne du surnom de « Perle des Antilles ». Et comme me l'a dit un jour notre agronome patriarcal, Schiller Nicolas, le pays renaissant vous en sera reconnaissant.